On a recu jusqu'a maintenant:

Affichage des articles dont le libellé est dictature. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est dictature. Afficher tous les articles

samedi 10 décembre 2011

Démocratie et dictature de la majorité

La démocratie et les décisions prises à la majorité donnent une aura de légitimité à des actes qui s'apparenteraient autrement à de la tyrannie. Mais pensez-y. Combien de décisions de notre vie quotidienne souhaiteriez-vous laisser à la règle de la majorité ou au processus démocratique? Regarder un match de football à la télévision plutôt qu'un épisode des "Experts"? Décider que vous devriez conduire une Chevrolet plutôt qu'une Ford, ou que la viande de votre dîner devrait être du jambon plutôt que de la dinde? Si de telles décisions étaient prises dans l'arène politique, la plupart d'entre nous les apparenteraient à de la tyrannie. Mais pourquoi ne considère-t-on pas ces décisions comme telle lorsqu'on laisse au processus démocratique décider à notre place des types d'ampoules que nous devons utiliser, de combien de litres d'eau doivent être employés pour tirer une chasse d'eau ou du montant à retirer de notre paye pour la retraite?

Les fondateurs des Etats-Unis abhorraient profondément la démocratie et la loi de la majorité. Dans le 10e numéro du Federalist Paper, James Madison écrit:

"Les règles sont trop souvent décidées non selon les règles de la justice et les droits des minorités, mais par la force d'une majorité intéressée et autoritaire."

John Adams prédisait quant à lui:

"Rappelez-vous, la démocratie ne dure jamais longtemps. Elle a tôt fait de se disperser, de s'épuiser, et de s'assassiner. Il n'y a encore jamais eu de démocratie qui ne se suicide."

Les Pères Fondateurs avaient l'intention de donner aux Américains une forme républicaine de gouvernement limité où la protection des droits inaliénables de l'individu, donnés par Dieu, serait la première mission de ce gouvernement.

Conscients des dangers posés par la tyrannie de la majorité, les concepteurs de la Constitution américaine ajoutèrent plusieurs règles anti-majorité. L'une d'elles est l'élection du Président non au scrutin universel direct, mais par le Collège des Grands Electeurs. Neuf Etats fédéraux réunissent à eux seuls plus de 50% de la population américaine. Si la majorité simple était la règle, ces neufs Etats suffiraient à décider de la présidence. Par chance, ils ne le peuvent pas, parce qu'ils n'ont que 225 Grands Electeurs sur les 270 votes requis pour l'emporter sur les 538 sièges du Collège. S'il n'y avait pas ce Collège Electoral, qualifié d'antiquité par certains politiciens désireux de s'en débarrasser, les candidats à l'élection présidentielle pourraient, sans aucun risque, se contenter d'ignorer les Etats fédéraux moins peuplés.

La création de deux chambres du Congrès par les Pères Fondateurs était, en partie, un autre raison de faire obstacle à la dictature de la majorité. Cinquante et un sénateurs suffisent à déjouer les plans de 435 députés et 49 sénateurs. La Constitution donne au Président un droit de veto pour affaiblir le pouvoir des 535 membres des deux chambres. Il faut une majorité des deux-tiers dans chacune des chambres pour outrepasser un veto présidentiel.

Changer la Constitution pour proposer un amendement requiert non la majorité, mais les deux tiers des votes des deux chambres, et pour que celui-ci s'applique, la ratification doit être approuvée par les trois-quarts des législatures fédérales. L'article V de la Constitution donne le pouvoir à deux-tiers des Etats fédéraux d'invoquer une assemblée constitutionnelle pour proposer des amendements qui deviendraient des lois une fois ratifiés par trois-quarts d'entre eux. J'étais pour cette option afin de décréter un amendement inscrivant une limite des dépenses dans la Constitution mais j'y ai repensé depuis. Les participants à la Constituante de 1787 étaient des hommes de haute stature morale comme James Madison, Thomas Jefferson, George Washington et John Adams; les participants d'aujourd'hui seraient des nains sur la même échelle - des Barney Frank, Chris Dodd, Olympia Snowe et autres Nancy Pelosi.

En plus d'abhorrer la démocratie et d'identifier l'Etat comme la plus grande menace à la liberté, les fondateurs des Etats-Unis cultivaient un profond mépris et une grande méfiance envers le Congrès. Ce mépris et cette méfiance s'expriment au travers de la phraséologie employée à travers le texte de la Constitution, en particulier la Déclaration des Droits, contenant des phrases telles que le Congrès ne doive pas "abréger", "transgresser", "nier", "déprécier", "violer".

Les Américains d'aujourd'hui pensent que la Constitution confère au Congrès l'autorisation de faire tout ce qu'il souhaite pour peu qu'il réunisse une majorité. Ils pensent qu'une nouvelle mesure est une bonne ou une mauvaise idée selon qu'elle passe ou non le vote, plutôt que selon la façon dont cette mesure s'inscrit vis-à-vis des pouvoirs conférés au Congrès par la Constitution.

Malheureusement pour le futur des Etats-Unis, le Congrès a exploité avec succès le mépris et l'ignorance des Américains envers leur propre Constitution.